Faire connaître la Turquie et ses habitants avec les yeux d'une alsacienne qui y vit depuis 20 ans.
3 Septembre 2008
Les mines font partie de mon enfance. Dans mon Alsace natale, ce sont les mines de Potasse qui composent le paysage aux alentours de Mulhouse avec des chevalements aux prénoms tels que Théodore, Rodolphe, Fernand ou Amélie, du nom de ceux qui ont tenu une place importante dans la découverte et la mise en place de l'exploitation de la potasse découverte en 1904.
Maison alsacienne à l'écomusée d'Ungersheim près de l'ancienne mine Rodolphe
C'est là qu'adolescente, j'escalade les tas de sel de potasse des alentours juchée sur la moto des copains, souvenirs, souvenirs !
Je découvre de plus près cet univers lors d'une journée "portes ouvertes" organisée à la fin des années 80, le père de ma fille étant lui-même, durant quelques années, mineur "au jour", à la fabrique.
Début avril 2008, je lis avec intérêt un dossier consacré aux mines de charbon de Zonguldak dont j'ignore alors l'existence. Ce jour-là, je me dis que je dois trouver le moyen de réaliser un article sur ce monde à part.
23 juin 2008 : une rencontre précipite cette envie enfouie au fond de moi ; celle avec Hülya et Sezai qui habitent en Belgique et dont la route croise la mienne devant la mosquée de Küçük Aya Sofia alors que je veux faire visiter cette petite merveille à une amie venue d'Alsace pour quelques jours. Je vous ai déjà parlé d'eux. Autour d'un thé que je leur ai proposé de boire ensemble, j'apprends qu'ils passent la journée à Istanbul avant de rejoindre leur famille pour quelques semaines dans la région de Zonguldak dont ils sont originaires.
Ma première erncontre avec Hülya et Sezai le 23 juin 2008
Mon sang ne fait qu'un tour et le mot "mine" vient immédiatement dans ma bouche. Le hasard fait que Sezai connait très bien cet univers où il a travaillé durant une dizaine d'années mais en Allemagne. Je lui parle de mon idée et sa réponse me laisse pantoise : je peux t'organiser cela, j'ai plein d'amis qui y travaillent, viens quand tu veux !
C'est le genre de choses qu'il ne faut pas me dire. Je réfléchis les deux jours suivants quand et comment je peux me déplacer là-bas. Vu le programme chargé des semaines à venir, il ne reste plus que... le week-end suivant. Echange de coups de fils, organisation, me voilà partie samedi 28 juin vers cette région de la Turquie que je ne connais pas et que je vous ai fait découvrir à travers plusieurs billets et quelques autres encore.
La descente est prévue au puits de Kozlu, un des plus importants, le lundi 30 juin au matin. Mais le plan de la journée s'effondre rapidement dans un bureau de l'administration du puits alors que nous sommes sur le point de nous faire enregistrer pour l'expédition prévue. En effet, la programmation de la visite du premier ministre turc prévue le lendemain au même endroit fait que toute descente est interdite aujourd'hui...
Les grisoumètres pour les visiteurs
Sezai et son ami mineur voient déjà la chance filer entre nos doigts mais je n'allais pas en rester là et accepter la situation aussi simplement.
Il n'y a pas que Kozlu dans les environs, je peux descendre dans une autre mine, mais je veux y aller aujourd'hui. Le lendemain matin, je repars pour Istanbul et je ne veux pas rentrer bredouille, c'est hors de question. J'ai tellement attendu cet instant, il faut trouver une autre solution.
Je prends la direction de la suite des opérations, plus habituée que mes amis à aller au bout de mes idées à l'aide de mes méthodes de communication.
Après avoir discuté avec plusieurs responsables de Kozlu, je demande à l'un d'entre eux d'appeler aussitôt devant moi la mine d'Üzülmez, ce site devant lequel nous sommes déjà passés ces derniers jours et qui m'avait "interpellé". Cela semble possible de descendre aujourd'hui mais... il me faut une autorisation officielle, celle de prendre des photos dans le seul puits de Zonguldak dont la profondeur permet la prise de vues sans risque, ce qui aurait été impossible à Kozlu.
Une seule personne est à même de délivrer le laisser-passer, c'est le directeur de l'exploitation de toutes les mines en personne qui se trouve au Beyaz Saray (Le Palais Blanc) en plein centre de Zonguldak, siège administratif central des Mines.
Hülya et sa belle-soeur Emine, revêtues de la tenue adéquate.
Aussitôt dit, aussitôt fait, la voiture prend la route du palais et nous nous retrouvons dans le bureau du responsable de la presse et de la communication à qui, pour la énième fois de la journée, j'explique mes objectifs. Il me laisse son ordinateur pour taper la dilekçe - demande - nécessaire avant de m'accompagner dans l'impressionnant bureau du directeur.
Ce dernier nous reçoit aimablement quelques minutes, bien qu'occupé à organiser les menus détails de la visite ministérielle du lendemain. Je ressors de là avec ma précieuse signature et le document est immédiatement faxé à l'exploitation du puits d'Üzülmez.
Sezai et son ami mineur dans la cage d'ascenseur qui permet de rejoindre le fond
Il ne nous reste plus qu'à se rendre à Üzülmez pour réaliser... un de mes rêves fous !
J'ai encore tant de choses à dire sur ces moments intenses vécus grâce à mes nouveaux amis que je ne remercierai jamais assez pour cela.
De gauche à droite, Turan, l'ingénieur accompagnateur, un mineur et le chef d'équipe du forage visité
Aussi, je vous propose de poursuivre la visite dans mon prochain billet et de continuer un bout de chemin dans les galeries ensemble.