Faire connaître la Turquie et ses habitants avec les yeux d'une alsacienne qui y vit depuis 20 ans.

Du bretzel au simit

Les soeurs de Konya quittent la Turquie après 27 ans de service

La version turque de cet article est lisible ici.

Sœurs Isabella et Serena, arrivées d'Italie à Konya le 8 mars 1995 pour vivre dans l'église Saint-Paul construite en 1910, quittent la Turquie après avoir servi pendant 27 ans.

De gauche à droite sœurs Serena et Isabelle à l'église Polycarpe d'Izmir

La Fraternité du Christ Ressuscité, du nom de leur communauté - Fraternità Gesù Risorto - a été fondée le 15 août 1977 dans un petit village appelé San Lorenzo Dorsino, situé dans la région de Trente en Italie et consacrée par l'évêque de Trente. “En effet, quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux. » (Mt 18, 20). Cette parole évangélique a suscité dans le cœur de deux prêtres, Vigilio Covi et Fiorenzo Soraruf, le désir d'offrir un lieu tangible à la présence de Dieu et ils ont souhaité vivre et habiter ensemble. C'est ainsi qu'a commencé l'histoire de la Congrégation dirigée à présent par le Père Vigilio Covi.

Jusqu'en 1935, il y avait des prêtres de la Congrégation augustinienne des Assomptionnistes à Konya. Puis, une fois par mois, un prêtre continuait à venir d'Ankara pour célébrer la messe. Après l'entrée en fonction des sœurs Isabella et Serena, cette venue mensuelle a perduré.

Église Saint-Paul de Konya

À la question de savoir pourquoi elles sont venues et quel était le but de leur installation en Turquie, Sœur Isabelle répond ainsi : “Trois saints (Sisinnio, Martirio et Alessandro) sont arrivés de Cappadoce, d'abord à Milan, puis à Trente. Là, ils ont fait connaître Jésus-Christ et ont été tués en 397. C'est pourquoi nous avons adoré leur ville natale. A cette époque, nous souhaitions les remercier de vivre la foi qu'ils nous ont apportée d'où ils venaient.”

Sœur Serena : « Vivre à Konya était facile car nous pouvions vraiment voir chaque jour que Dieu nous aidait et nous montrait le chemin. Nous le remercions toujours pour cela.”

«Les chrétiens à Konya ne sont que quelques personnes, toutes les autres sont de confessions musulmane et nous vivons à côté d'eux. Nous avons de bonnes relations avec nos voisins, nous avons aussi œuvré pour être bonnes avec les gens, avons rencontré plusieurs familles et sommes devenus amis. Au début, nous ne connaissions pas la langue turque, les gens nous ont aidées. Par ailleurs, Rumi vivait à Konya, il avait une pensée aimante très ouverte. Nous sommes toujours proches d'Esin Çelebi Bayru, la 22ème arrière-petite-fille de Mevlâna Celaleddin Rumi. Nous nous téléphonons de temps en temps, nous célébrons certaines fêtes ensemble. Elle est venue dans notre église à Noël dernier. Pour toutes les raisons ci-dessus, nous quittons Konya avec nostalgie. Nous sommes heureuses de dire à présent que nous sommes de Konya." explique sœur Isabella.

De gauche à droite Sœur Serena,  Esin Çelebi Bayru, 22ème arrière-petite-fille de Mevlâna, et sœur Lidia d'Italie, venue de la congrégation de la Fraternité du Christ ressuscité

Déclarant que la communauté chrétienne turque à Konya est très petite, mais que de nombreux réfugiés irakiens chaldéens sont venus à Konya tout au long de ces 27 années de présence, les sœurs ont indiqué que des Africains de différentes nationalités (Congo, Nigeria, etc), soit étudiants, soit qui travaillent, vivent ici depuis ces 7 ou 8 dernières années. Quelques Iraniens y vivent également, mais ils sont peu nombreux. Tous les dimanches, environ 25-30 personnes viennent ainsi à l'église où a lieu une réunion de prière, même en l'absence de la messe mensuelle. Les fidèles sont plus nombreux lors des grandes fêtes chrétiennes.

À la question : « Est-ce que quelqu’un vous remplacera ou bien l'église Saint-Paul restera-t-elle vide ? », Soeur Serena répond en souriant : «L’église de Konya est affiliée à l'archidiocèse d'Izmir, ils ont réfléchi et préparé notre départ. Une personne viendra après nous, Maria Grazia. L'église ne restera donc pas vide, rendons grâce pour cela. Nous sommes heureuses qu’elle reste ouverte, sinon nous ne serions pas parties. »

Hz. Esin Çelebi, petite-fille de la 22e génération de Mevlâna, a assisté à la fête de Noël 2021 à l'église Bayru Konya - avec Maria Grazia

Maria Grazia Zambon de l'Ordre Virginum, qui remplacera sœurs Isabella et Serena, résidait auparavant à Ankara. Elle est rattachée au diocèse de Milan, en Italie, avec un "Fidei donum", à savoir le “don” d'un fonctionnaire ecclésiastique d'un épiscopat à un autre.

« Pourquoi êtes-vous venues à Izmir avant de quitter la Turquie ? » En réponse à cette question, sœur Isabella explique : « Demain, 6 janvier, nous remercierons Dieu à la Maison de la Vierge-Marie à Ephèse, car avant d'aller à Konya le 7 mars 1995, Monseigneur Bernardini, alors archevêque d'Izmir,  nous a bénies là-bas avant de commencer notre oeuvre à Konya. Alors maintenant pour boucler la boucle, nous retournons au même endroit afin de rendre grâce au Seigneur. »

Maison de la Vierge Marie, dernière visite des sœurs Isabella et Serena le 6 janvier 2022 - aux côtés des pères Vigilio Covi et Fiorenzo Soraruf et Maria Grazia

Dimanche 9 janvier, les deux sœurs, avec leur communauté et des membres de leur congrégation, ont célébré un service d'adieu pour saluer leurs amis. Le Père Felianus Dogon, Vicaire Général de l'Archidiocèse d'Izmir, a présidé cette cérémonie, entouré par le Père Alessandro Amprino, Chancelier de l'Archidiocèse d'Izmir et le diacre Nicola.

Église Saint-Paul de Konya, 6 janvier 2022, messe d'adieu aux soeurs Isabella et Serena

Lundi 10 janvier, les sœurs Isabella et Serena de l'église Saint-Paul, située dans le district de Meram à Konya Meram, et leurs accompagnateurs, le père Felianus, le père Alessandro Amprino ainsi que Maria Grazia, ont effectué une visite d'adieu à Zekeriya Koçak, mufti du secteur. Exprimant sa satisfaction de cette visite, ce dernier a remercié la délégation pour sa visite significative et présenté ses vœux de  bonne continuation aux sœurs dans leurs nouvelles fonctions en Italie. Il a également souhaité plein succès à Maria Grazia, nouvellement nommée.

De gauche à droite Maria Grazia, Sœur Isabella, Sœur Serena, Père Alessandro Amprino, Zekeriya Koçak, mufti du district de Konya Meram, Mufti adjoint et Père Felianus - Crédit photo direction du service de culte musulman de Konya Meram

Les sœurs Isabella et Serena quitteront la Turquie dimanche 16 janvier 2022. Elles retourneront dans leur Congrégation en Italie pour y résider.

Alors que nous terminons notre rencontre, sœur Isabelle met sa main sur son cœur : « La Turquie et Konya resteront dans nos cœurs !” dit-elle chaleureusement.

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A
Merci Nathalie pour cet aperçu détaillé de la vie de ces deux soeurs que j'ai rencontrées très peu et qui me sont apparues tellement simples et rayonnantes. Et merci aussi de nous permettrre de prier pour Maria-Grazia qui poursuit leur mission en connaissant mieux celle-ci.
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N
Jusqu'à il y a 3 ans, j'allais régulièrement une fois par an à Konya et il y avait toujours un moment prévu pour passer du temps avec elles... J'espère reprendre cette bonne habitude ce printemps Annick !
G
Merci, ma chère Nathalie, de nous donner des nouvelles "différentes" que nous n'aurions jamais connues sans tes publications... Et bonne continuation à ces deux religieuses pour lesquellles ça n'a pas dû être facile de quitter la ville de Mevlânâ...
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N
Merci ma chère Gisèle ! Je transmets avec plaisir tes voeux à Soeur Isabella et à Soeur Serena... Il est certain que 27 années à Konya, c'est une sacrée tranche de vie et qui marque à tout jamais...