Faire connaître la Turquie et ses habitants avec les yeux d'une alsacienne qui y vit depuis 20 ans.

Du bretzel au simit

Jean-Paul Didierlaurent, lauréat du Prix Littéraire NDS 2018 avec "Le liseur du 6h27"

De La Bresse à Istanbul... en passant par Mulhouse

Jean-Paul Didierlaurent est le lauréat de la 10ème édition du Prix Littéraire Notre-Dame de Sion 2018 avec son premier roman "Le liseur du 6h27". La cérémonie de remise du Prix – qui récompense en alternance une année un auteur français traduit en turc, l’autre année un auteur turc - a eu lieu le 9 mai au Palais de France d'Istanbul en présence de Bertrand Buchwalter, Consul Général de France à Istanbul.

Cérémonie de remise du Prix Littéraire Notre-Dame de Sion 2018 au Palais de France d'Istanbul
Cérémonie de remise du Prix Littéraire Notre-Dame de Sion 2018 au Palais de France d'Istanbul

Cérémonie de remise du Prix Littéraire Notre-Dame de Sion 2018 au Palais de France d'Istanbul

Cet écrivain vosgien, né à La Bresse, s'est mis à écrire sur le tard, à l'âge de 35 ans bien que l'envie était présente depuis l'âge de 20 ans lorsqu’il a découvert Stephen King qui lui a donné l'envie d'écrire. « Par ses nouvelles, je trouvais enfin quelqu'un qui me racontait des histoires. Alors, je me suis dit que j'aimerais bien un jour en raconter aussi. Mais à qui ? A des amis ? Je me sentais trop pudique pour ça. Et puis, j'ai découvert l'existence d'un concours de nouvelles dans ma région, le Prix Henri Thomas à Saint-Dié, qui a été un déclencheur. C'est anonyme, on envoie son texte, 4 pages - c'est très court -. J'ai remporté ce Prix et ça m'a donné l'élan pour continuer. »

Jean-Paul Didierlaurent a ainsi continué pendant 15 ans a écrire des nouvelles et a gagner de nombreux prix. Ces derniers lui valent quelques éditions dans des journaux et dans plusieurs recueils collectifs mais hormis le jury qui vous lit, il y a peu de lecteurs. Malgré la dizaine de Prix récoltés, les éditeurs n'étaient guère intéressés.

Jean-Paul Didierlaurent, lauréat du Prix Littéraire Notre-Dame de Sion 2018

Jean-Paul Didierlaurent, lauréat du Prix Littéraire Notre-Dame de Sion 2018

L'idée du Liseur était dans son esprit depuis la rédaction d'une nouvelle sur le thème du livre 10-12 ans avant d'écrire le roman mais pour se lancer dans ce nouveau travail d’écriture, il ne trouvait pas le temps nécessaire...

La rencontre avec Marion Mazauric, sa future éditrice – il ne savait alors pas que ce serait elle – fut décisive. Il lui parle de son idée et elle lui propose une résidence d'auteur qui lui permet d'écrire. Elle sait ce qu'il écrit, qu'il a entre autres remporté le Prix Hemingway 2010 et elle est intéressée de lire quelque chose de plus conséquent. Le "Liseur du 6h27" est finalement publié en mai 2014...

"Le Liseur du 6h27", premier roman de Jean-Paul Didierlaurent

Ce premier roman - tout comme les précédents écrits de l'auteur - est de la pure fiction. Didierlaurent avait déjà créé Guylain Vignolles, le personnage principal, pour traiter le thème du livre dans une de ses nouvelles et a trouvé intéressant de prendre le thème à l'envers avec quelqu'un qui détruit les livres. Il n'a jamais rencontré de dame-pipi comme la Julie du Liseur mais en avait créé une pour la nouvelle qui a gagné le Prix Hemingway. Il aime l'univers carrelé dans lequel elle évolue, encore un personnage intéressant à développer... En fait, durant les années où l'écrivain a ce projet de roman en tête, plusieurs personnages et environnements sont venus se greffer dans l'histoire finale.

Deux mois avant la date de publication, l'Espagne est intéressée et souhaite acquérir les droits... et 23 autres pays achètent le Liseur avant même la sortie de la version française, un buzz extraordinaire ! Les médias prennent le relais en s'intéressant immédiatement à l'écrivain, les libraires encensent le livre et les lecteurs sont également au rendez-vous... A ce jour, "Le Liseur du 6h27" a été publié dans 36 pays – dont la Chine et bien entendu la Turquie - dans une trentaine de langues, un sacré succès !

Jean-Paul Didierlaurent au Palais de France à Istanbul 

Ce raz-de-marée médiatique change considérablement la vie quotidienne de Jean-Paul Didierlaurent, sollicité de toutes parts. Il voyage beaucoup, se retrouve dans des lieux et au contact de personnes qu'il n'aurait sans doute jamais fréquentés auparavant, croise des auteurs passionnants et des lecteurs qui le sont tout autant...

Fonctionnaire chez Orange, il a la chance de pouvoir travailler à mi-temps depuis janvier 2015 après avoir pris un premier congé sabbatique de 4 mois, peu après la publication du Liseur. Ce nouvel emploi du temps lui permet de participer aux différents salons du livre où il est invité, aux séances de dédicaces proposées par les libraires, etc.

Séance de dédicaces de Jean-Paul Didierlaurent au Palais de France d'Istanbul

Séance de dédicaces de Jean-Paul Didierlaurent au Palais de France d'Istanbul

Jean-Paul Didierlaurent vit toujours à La Bresse, la ville où il est né. En 1983, il rentre aux PTT et passe d'abord 1 an et demi à Paris, passage obligé. Pour revenir travailler dans l'Est, il est difficile de décrocher une place dans les Vosges, contrairement à l'Alsace. Il établit alors une fiche de vœux pour Mulhouse où il arrive en 1985. Il y travaillera jusqu'en 1994, les 4 dernières années étant passées à faire la route quotidienne entre Mulhouse et La Bresse où il est retourné habiter entre temps.

Depuis la publication du Liseur, l'auteur a continué d'écrire et d'être publié. En 2015 est paru "Macadam", un recueil de nouvelles, puis son second roman "Le reste de leur vie" qui est paru en 2016, toujours de la fiction mais plus centrée dans le rêve. Son petit dernier, "La fissure", roman de fiction ayant un côté fantastique et comportant un personnage assez inattendu, a été publié en janvier 2018.

Jean-Paul Didierlaurent et son premier roman "Le Liseur du 6h27" 

L'écrivain dit toujours qu'il a mis 10 ans et 2 mois pour écrire "le Liseur du 6h27". Il l'avait depuis 10 ans en tête mais la rédaction fut assez rapide. "Le reste de leur vie" était à l'esprit durant 3 ans et a mis deux mois à être couché sur le papier. "La fissure", s’est fait avec une gestation bien plus courte mais a nécessité 3-4 mois d'écriture...

Jean-Paul Didierlaurent souhaite continuer à écrire. Pour l'instant, il est en pleine promotion de sa dernière publication et participe à de nombreuses rencontres et fréquente beaucoup de salons. Une fois le tourbillon retombé, il prendra le temps de développer son idée du moment, ce nouvel embryon qui ne demande qu'à grossir et à prendre vie sous sa plume.

L'écrivain Jean-Paul Didierlaurent et Aysel Bora, traductrice de son roman "Le liseur du 6h27", palais de France d'Istanbul

L'écrivain Jean-Paul Didierlaurent et Aysel Bora, traductrice de son roman "Le liseur du 6h27", palais de France d'Istanbul

Par ailleurs, cet écrivain, d'une grande sensibilité, a eu l'occasion d'intervenir à trois reprises en prison et en garde un souvenir très fort. En 2011 d'abord, il rencontre et s'entretient avec des détenus à Montpellier dans le cadre de la lecture de sa nouvelle ayant remporté le Prix Hemingway. Puis, à Bourg–en-Bresse, il y a 3-4 ans, il passe du temps avec une trentaine de détenus qui ont lu son livre auparavant. Certains prisonniers, invités par leurs professeurs à travailler sur son livre en amont de leur rencontre, lui offrent des cadeaux personnalisés, qui le titre du Liseur gravé sur un savon, qui une BD maison…

Sa dernière visite en prison a eu lieu à Chambéry avec une dizaine de détenus qui avaient aussi lu le livre avant sa venue. D'entrée, un détenu noir l'interpelle pour lui dire que dès le début de la lecture, il n'a pas du tout aimé son ouvrage... En effet, il n'a pas supporté l'allusion au pied bot d'un personnage... sa fille en ayant un. Didierlaurent écoute, discute, explique... et tout finit par s'arranger avec le prisonnier. Tranche de vie...

Jean-Paul Didierlaurent dans la médiathèque du lycée Notre-Dame de Sion d'Istanbul

Jean-Paul Didierlaurent dans la médiathèque du lycée Notre-Dame de Sion d'Istanbul

De son séjour de 4 jours à Istanbul, Jean-Paul Didierlaurent pourrait bien être inspiré pour une nouvelle rédaction : « Oui Istanbul pourrait devenir une source d'inspiration. Il y a tellement de matières à utiliser ici dans une grande métropole comme Istanbul. Le Grand Bazar, par exemple, je pourrais très bien écrire quelque chose qui se passe uniquement dedans tellement c'est une ville dans la ville, avec tous les marchands, tous les artisans qui travaillent là, les gens de l'extérieur qui y viennent. Ou un recueil de nouvelles par exemple, plein de petites histoires. Je pense que ça existe, que cela a dû être fait, en tout cas ce serait j'imagine un livre très coloré dans un endroit pareil, et en même temps hors du temps. »

Rendez-vous est pris pour le prochain roman de cet écrivain attachant et profondément humain, pour qui chaque homme est extraordinaire, chapeau bas l’artiste !

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
H
Merci beaucoup !
Répondre