4 Janvier 2011
Article réalisé avec le concours de Yves-Marie LAOUENAN et de
En vous faisant découvrir récemment le magnifique site de Xanthos inscrit au Patrimoine Mondial de l'Unesco depuis fin 1988, j'ai évoqué très succinctement les vestiges encore visibles aujourd'hui sur place du monument des Néréides.
Dominant la terrasse située en contrebas de l'agora inférieure du secteur romain, les deux assises du soubassement ne donnent qu'une piètre idée de l'édifice d'origine.
Assises en pierre du monument des Néréides à Xanthos
Ce dernier, dont la situation symbolique au-dessus de la porte de la ville a été parfaitement réfléchie par le personnage à l'origine de sa construction, figure parmi les plus somptueux de l'antiquité classique.
Ce magnifique ouvrage mélangeant allègrement des caractéristiques lyciennes et grecques aurait été réalisé en 390-380 av. J.-C. pour abriter la sépulture du roi Arbinas, dernier souverain de la dynastie harpagide qui règne au début du IVème siècle av. J.-C. sur Xanthos, capitale lycienne, mais aussi sur les villes voisines de Pinara, Telmessos (l'actuelle Fethiye) et Tlos.
Le monument des Néréides, visible au British Museum de Londres - crédit photo Francis Prost
Arbinas, élevé par un précepteur grec, conseillé par le devin grec Symmachos de Pellana, n'aura de cesse, durant son règne, d'imposer la culture grecque dans laquelle il baigne, en doublant notamment les textes lyciens par des inscriptions en langue grecque sur diverses constructions.
Le monument des Néréides tire son nom de la mythologie grecque, des nymphes de la mer, filles de Nérée et de Doris, représentées comme de belles jeunes filles à la chevelure ornée de perles dont la mission consiste à accompagner les âmes des morts.
Un certain nombre de statues les évoquant sont visibles, tant sur l'édifice même, au milieu des colonnes, qu'autour de celui-ci.
Voluptueuse Néréide entourant le monument au British Museum - crédit photo Francis Prost
Néanmoins, certaines marques iconographiques y figurant, telles certains animaux marins, évoquent une identité plus lycienne, peut-être les Eliyana, nymphes locales en relation avec l'eau.
Charles Fellows, voyageur anglais ayant découvert Xanthos en 1838 alors qu'il effectuait un déplacement en Asie Mineure, requiert et obtient les premières autorisations administratives pour réaliser des fouilles sur le site.
Charles Fellows, crédit internet
En 1842 et en 1844, le monument des Néréides va être quasi entièrement amené à Londres par Charles Fellows. Il sera superbement reconstitué au British Museum, premier musée public au monde créé en 1753, devenant un de ses plus beaux joyaux.
Le tombeau, tout de marbre blanc, y compris la charpente et la toiture, a semble-t-il été réalisé par des artisans grecs, voire athéniens au vu de certains éléments décoratifs de ce monument exceptionnel qui a tout d'un temple ionique.
Crédit photo Francis Prost
Les sculptures, tant au niveau des frises de bas-reliefs superposées couronnant le socle que celles des frises ornant le mur de la cella - enceinte sacrée abritant des lits en pierre supposés être des lits de table destinés aux banquets funèbres - sont d'une richesse incroyable.
Les décors représentent des scènes de guerre, de chasse, de banquets, d'offrandes, mais également d'une audience accordée par un personnage habillé à la perse abrité du soleil par un serviteur tenant un parasol.
Un corps et des formes plus vrais que nature - crédit photo Francis Prost
Si le monument des Néréides a trouvé sa place au British Museum, Jacques des Courtils, directeur de la mission française archéologique de Xanthos, dans ses songes les plus extravagants, rêve de trouver un mécène lui offrant l'opportunité de recréer, en lieu et place, une copie digne de ce nom de cet édifice prestigieux qui fait partie intégrante de la suprématie de l'ancienne capitale lycienne.
Et si un jour ce rêve devenait réalité... Il est toujours permis d'espérer, tout particulièrement en ce début d'année où les voeux sont de circonstance !