29 Août 2010
Par le passé, Istanbul se déclinait dans tous les tons de vert. Collines et forêts verdoyantes étaient bien plus importantes que de nos jours, il suffit de regarder quelques cartes postales anciennes des rives du Bosphore pour s'en convaincre.
Dire qu'aujourd'hui Istanbul n'est plus une ville verte serait exagéré car elle possède encore de nombreux parcs de toute beauté. De même, arbres et fleurs sont présents aux quatre coins de la ville et certains quartiers particulièrement agréables tant la végétation y est dense.
Ce matin à 8 heures, la route qui traverse la forêt de Belgrade vers Bahçeköy est déserte...
A l'ouest de la rive européenne entre la Mer Noire et les zones surbâties se trouve la forêt de Belgrade, un des poumons de la mégalopole.
Au début du XVIIIème siècle, cette ceinture verte des montagnes d'Istranca prolongeant les Balkans formant durant l'empire ottoman la principale source d'alimentation en eau d'Istanbul s'étendait sur plus de 13 000 ha, au milieu des années 90 seulement 5 442 ha...
Deux axes principaux permettent de donner une idée du tracé de la forêt actuelle, l'un étant le tracéTaksim-Sarıyer-Kilyos sur une vingtaine de kilomètres de long, l'autre de près de cinq kilomètres, du quartier de Çayırbaşı au bord du Bosphore vers Bahçeköy et ensuite, de l'autre côté, vers la forêt de Fatih.
Une végétation touffue
Le nom de cet immense bois vient de Belgrad Köyü - le village de Belgrat -, situé à quelques kilomètres de Bahçeköy, lui a été donné durant le règne du sultan Soliman le Magnifique, au milieu du XVIème siècle.
On y trouve alors de nombreuses résidences d'été où les membres de la communauté étrangère de Pera - l'actuel Beyoğlu - affectés aux ambassades, particulièrement celle de France, ainsi qu'une minorité d'Arméniens, atteints de maladies contagieuses, viennent se soigner dans cet environnement d'arbres et d'eau dès les premières chaleurs estivales.
La fougère y est importante
La célèbre écrivain britannique Lady Montagu, épouse d'Edward Wortley Montagu nommé ambassadeur à Constantinople, évoque son séjour à Belgrat köyü dans une lettre adressée en juin 1717 au poète Alexander Pope.
Elle y décrit la richesse des lieux où se trouvent juste quelques chrétiens et décrit son cadre de vie entouré d'arbres fruitiers et d'une végétation luxuriante.
Des mûres par milliers
Le village est évacué sur ordre du sultan Abdul Hamit en 1896 suite au rapport d'un spécialiste français stipulant que l'eau du village est devenue impropre à la consommation à cause des malades qui viennent s'y soigner...
Des arbres parfois nus, parfois vêtus d'une épaisse couche...
La forêt de Belgrade est un site protégé depuis 4 siècles et abrite une variété de chênes centenaires, mais aussi des bouleaux, des hêtres ainsi que des marronniers.
La faune y est encore importante, oiseaux et mammifères hôtes de ces bois (tels que biches, sangliers ou renards) y vivent en toute quiétude, la chasse y étant interdite.
Les araignées y tissent de splendides toiles...
Elle porte encore aujourd'hui le surnom de "forêt humide", copieusement arrosée qu'elle est par les pluies habituelles en Mer Noire, en plus de la fraicheur des vents de la région.
Un décor digne de somptueuses natures mortes
C'est devenu un endroit privilégié pour les randonneurs à vélo mais également pour les familles stanbouliotes qui viennent y pique-niquer sur des aires aménagées à cet effet, s'y promener, recharger les batteries en oxygène, comme je l'ai fait ce matin de très bonne heure avant que les environs ne soient envahis...
Attention aux excès de vitesse...
Cet automne, je compte bien y retourner pour cueillir des champignons qui abondent aux dires de certains et qui intéressent plus les papilles françaises que turques...