5 Avril 2009
Certains soirs de match, selon la direction du vent, j'entends les cris des supporters de l'équipe de football de Beşiktaş, le stade où ils évoluent étant tout proche à vol d'oiseau.
J'ai suivi sur grand écran à maintes reprises les matchs de derby, palpité au même rythme que les supporters et crié aussi fort qu'eux. Mais là, enfin, pour la première, j'ai assisté hier soir au match qui opposait Beşiktaş à Kayserispor en coupe Türkcell Super Lig (l'équivalent de la Ligue 1 en France).
Les prix des billets variaient pour le match d'hier de 35 à ... 500 TL, soit de 15 à 240 € environ
Le foot, c'est une histoire de famille, on suit les matchs ou on va au stade avec femme et enfants. Les enfants sont déjà initiés au rituel de l'équipe supportée. Les femmes ne sont pas en reste d'ailleurs et elles n'hésitent pas à revêtir des tenues adéquates qui permet de les identifier et à chanter et crier aussi fort que leur compagnon. Je portais d'ailleurs autour du cou mon écharpe noire et blanche, couleurs de l'aigle de Beşiktaş, emblême de l'équipe.
Le football fait partie intégrante de la vie quotidienne en Turquie et alimente de nombreuses conversations. Combien de fois, même en étant femme, de plus étrangère, ne m'a-t-on pas demandé quelle équipe je supportais. Et depuis mon installation à Istanbul, je réponds invariablement "Ben Beşiktaşlıyım !" (Je suis pour Beşiktaş !)
Une jeune supportrice
Une soirée entre le père et le fils
La période avant-match permet de se mettre dans l'ambiance. 17 h : dans les rues et sur les places du centre de Beşiktaş, les supporters s'échauffent la voix, prennent des forces dans les nombreuses lokanta du coin, la bière coule à flots.
17 h 15 dans les rues de Beşiktaş, les supporters s'entraînent...
Petit à petit, ils se retrouvent sur l'avenue principale qui longe le Bosphore et bloquent un moment une file de circulation... jusqu'à ce que la police intervienne.
18 h 30 : une marée humaine envahit les larges trottoirs qui mènent jusqu'au stade. Le match de ce soir est important ; en effet, Beşiktaş est en seconde position au classement, à un point derrière Sivas (qui depuis deux saisons est dans une forme éblouissante). L'équipe de Kayserispor, quant à elle, est 7ème.
18 h 57 : ça y est, nous sommes dans l'enceinte du stade Inönü, situé juste en face du palais de Dolmabahçe. Il porte le nom d'un ancien Premier Ministre, élu second Président de la République à la mort de Mustafa Kemal Atatürk.
Ce stade, d'une capacité de 32145 places, a été construit dans les années 40 et inauguré le 19 mai 1947. Le club de football de Beşiktas a, pour sa part, été créé en 1903.
Les arbitres sont en pleine séance d'échauffement, les gradins commencent à se remplir. De nombreux supporters arrivés après nous ont les yeux rougis et larmoyants, ayant dû se frayer un passage au milieu des bombes de gaz lacrymogène lancées à l'extérieur.
La tribune des officiels, qui se remplira durant les dernières minutes qui précèdent le début du match
19 h 20 : l'équipe adverse entre sur le terrain sous les sifflements. J'essaie de m'imaginer ce que peuvent ressentir des joueurs hués qui doivent rester concentrés et se préparer à affronter une des équipes les plus prestigieuses du pays... 19 h 35 : l'équipe de Beşiktaş arrive à son tour, un peu en retard, le bus qui les véhicule jusqu'au stade ayant eu du mal à circuler sur la fin du parcours.
Quelques minutes avant le début du match prévu à 20 h, les deux équipes traversent le stade et s'alignent devant la tribune officielle. L'hymne national retentit dans la nuit.
Le match peut commencer ! Le ballon change de camp sans arrêt, l'arbitre semble parfois être aveugle....
Beşiktaş attaque, 16ème minute de jeu !
A la 27ème minute, goalllllll ! Yusuf Şimşek marque un but pour Beşiktaş, l'ambiance est électrique ! La mi-temps permet juste de reprendre son souffle, de s'asseoir un peu, de discuter avec un des 400 agents privés de la sécurité en poste ce soir, en plus des services de police et des CRS (qui se sont fait accueillir par des sifflements).
L'arbitre siffle la fin de la première mi-temps !
Pour un premier match en live, je ne suis pas déçue ! Je suis le match tout en regardant et écoutant autant de moi la foule des supporters. Il y a de quoi faire un album avec tous les chants entendus ce soir. Lors de la seconde mi-temps, les "hollas" de Beşiktaş se succèdent, le show est parfaitement orchestré, c'est impressionnant !
On en oublie presque de regarder le match pour voir les différentes tribunes chanter, onduler, lever les mains, se tourner à tour de rôle. Il faut l'avoir vécu pour ressentir ces vibrations qui t'envahissent.
Après les trois minutes de prolongation de la deuxième partie, le match se termine par le même résultat 1-0 pour Beşiktaş. Le classement reste inchangé !
Quand on est agent de sécurité, on ne regarde pas dans le bon sens !
Dans huit semaines, la saison sera terminée. Entre temps, Beşiktaş recevra à domicile, entre autres, deux équipes qui évoluent comme elle sur le plan européen, Fenerbahçe (le 3 mai) et Galatasaray (le 24 mai). Le 31 mai, le champion sera fêté comme il se doit, que le meilleur gagne !
Pour l'instant, les marchands de "köfte", de sandwichs et d'accessoires noir et blanc sont en pleine effervescence à la sortie du stade...
Quelle soirée, je ne suis pas prête de l'oublier !