Faire connaître la Turquie et ses habitants avec les yeux d'une alsacienne qui y vit depuis 21 ans.

Du bretzel au simit

Quand la pluie joue le trouble-fête dans les alpages türkmen

La journée s'annonçait pourtant belle ce matin-là à Aşağı Aydere Köyü. Rien ne laissait présager que le ciel s'abattrait sur nous quelques heures plus tard, mais en altitude le temps peut changer si vite.

J'avais hâte de retourner dans les alpages des türkmen à une bonne heure de route à pied du village. Les tirages papier des photos prises l'an passé étaient prêts. Lorsque nous sommes partis, nous avons décidé d'emmener des parapluies... 

 
                                                 Ciel gris dans les yayla

Parfois les sentiers sont tracés, à d'autres moments c'est à travers champs qu'il faut passer. Quelques hommes fauchent encore, en cadence, avant que la pluie n'arrive. Il ne s'agit pas de perdre le rythme car un accident est vite arrivé. Le tempo est parfaitement orchestré.

  

Des nuages noirs viennent assombrir le ciel, il faut marcher plus vite.


  
                                  

Heureusement que nous arrivons dans les alpages car la pluie commence à tomber, quelques gouttes éparses d'abord.

 

Une dernière pente à dévaler avant de foncer dans la première épicerie d'un des trois villages türkmènes qui ont ici leur alpage estival.

La jeune Burcu s'empresse de nous préparer un thé pour nous réchauffer car la température a dégringolé avec l'humidité ambiante. Les gouttes de pluie se font entendre au-dessus de nos têtes et il faut isoler au mieux les toits pour éviter les infiltrations, tant des trombes d'eau s'abattent en quelques minutes, transformant en gadoue bien glissante les chemins des alentours.

Une jeune fille arrive, trempée ! Même si je ne connais pas son nom, je la reconnais immédiatement pour l'avoir photographiée l'an passé. Elle s'appelle en fait ... Yağmur et porte bien son nom... Elle aussi se souvient de moi et aussitôt nous fouillons dans les photos pour trouver celles qui la concernent ainsi que ses soeurs.

 
                             Burcu et sa casquette ainsi que la charmante Yağmur

La pluie ne semble pas vouloir cesser, nous allons donc faire quelques pas de deux sans tomber pour chercher la maison de Birgül, autre charmante jeune fille qui nous avait accueillis l'an passé avec une gentillesse extrême.

Yağmur nous y emmène directement, ici tout le monde se connaît. Quel bonheur de revoir Birgül et son sourire permanent aux lèvres. Elle nous présente son fiancé... que nous ne connaissions pas encore et dont la gentillesse identique à celle de sa bien-aimée transpire au premier contact.

  
                                  Öskan, le fiancé, la maman de Birgül et cette dernière

La maman de Birgül nous prépare du thé et de l'ayran. Si la pluie ne devait s'arrêter, nous trouverions refuge ici pour la nuit sans souci. C'est un grand bonheur de revoir ces personnes qui nous ont ouvert leur maison l'an passé avec simplicité et chaleur. Birgül m'écrase presque les doigts durant ces minutes passées ensemble, main dans la main, heureuses de nous retrouver.

Un petit bout, trempé comme une soupe dans son survêtement rose, vient rejoindre Yağmur, sa petite soeur au nom tout aussi mignon, Damla, la goutte, suivie un peu plus tard par l'aînée, Bahar, le printemps, un trio féminin des plus attachants.

 

Il est difficile de partir mais une autre visite nous attend. C'est promis, je reviendrai encore passer plus de temps avec mes petites copines des alpages.

Enver retrouve avec joie Kazım bey avec qui il a passé beaucoup de temps dans son enfance. Une belle moustache, le béret sur la tête comme il se doit, il affiche un sourire radieux en compagnie de son adorable épouse.


 


Il faut quitter les alpages, la route est encore longue et il pleut à présent un peu moins fort. C'était bien trop court, j'aurais aimé passer des heures ici. Le temps semble s'être arrêté, l'air y est différent, il a le goût de l'amitié franche et sincère, comme tant d'endroits en Turquie.

Au moment de partir, une femme attire mon regard. C'est une vieille dame türkmène de plus de 75 ans, au minois attendrissant. Avec sa canne qui la porte, elle me dit "mais je ne te connais pas" lorsque je m'approche d'elle.

 
                 

Ce n'est pas grave, lui ai-je répondu. Son visage parle pour elle, son regard et son sourire suffisent à m'émouvoir. Elle porte sur elle des foulards resserrés aux bras, autour du cou un pendentif qui marque ses origines! Ah mamie, je te trouve si belle !

                 

Yağmur et Damla nous accompagnent un bout de chemin mais nous les invitons à rentrer chez elles, elles sont déjà tellement mouillées.

 

Nous pressons le pas et nous éloignons des villages. C'est à ce moment-là qu'en nous retournant une dernière fois, nous voyons arriver vers nous une petite tache rose qui grandit, tant elle court à perdre haleine sous la pluie qui vient de redoubler. 

Damla porte dans sa main un petit bouquet de fleurs séchées du coin, Yağmur l'a chargée de me le remettre, en souvenir de notre amitié. Ce sont d'autres gouttes qui tombent alors... Ce petit bouquet très symbolique est bien arrivé à Istanbul et est posé dans la cuisine. Souvent, je le regarde en me disant que finalement le bonheur tient parfois à peu de choses et qu'il faut peu de choses pour être heureux ...

 

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B
<br /> bjr moi aussi je suis une birgul, je suis turque mais une yötük, je suis nee en france mais j'ai passer 6 annee en turquie.c vrai, c plein de convivialite, plein de bonheur tres simple qui parfois<br /> se resume a pas grand chose mais tellement reelle.Et moi aussi j'avais une mamie comme cette dame ride, elle etait ride car elle avait vecu d'une facon different de nos mamie francaise mais elle<br /> etait tres belle.Alors merci por ces belles fotos,merci pour cette sincerite et peut etre une suite a cette histoire comme on dit chez nous inchallah<br /> <br /> <br />
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N
<br /> Ravie de faire votre connaissance sevgili Birgül ! Les bonheurs les plus simples sont souvent les plus beaux et j'en ai vécu beaucoup, particulièrement dans ces yayla ! Votre petit mot me donne<br /> envie de me souvenir aujourd'hui même, par le biais de quelques photos que je vais publier, de ces moments.<br /> <br /> <br />
C
bonjour, et super sympa tonsite!<br /> je suis de bonneval et celam'a donné envie d'y emmener ma fille de 6 ans, il y a effectivement beaucoup de points communs avec mon village d'origine, bonne continuation.florence
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N
<br /> <br /> Je ne suis pas certaine d'avoir bien compris, ton village d'origine est en France ou en Turquie ? S'il est en France, il va falloir m'expliquer quels sont ces points communs avec les alpages des<br /> villages türkmen, cela m'intrigue beaucoup. A bientôt.<br /> <br /> <br /> <br />
J
Tu étais en pélerinnage. Tes derniers mots concernant ce petit cadeau résume là une bien belle journée, émouvante.
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N
<br /> Comme tu dis, une bien belle journée mais bien trop courte à mon gré.<br /> <br /> <br />
M
Vraiment très touchant, ton récit et cette mamie türkmen est tout à fait adorable!<br /> <br /> Que ce soit du point de vue de la météo ou de l'habitat, il y a bel et bien beaucoup de points communs entre les régions de haute montagne. La première photo me rapelle le village de Bonneval sur Arc à quelque 1800 m d'altitude en Savoie tel que je l'ai découvert il y a 40 ans!!!
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N
<br /> <br /> Quand prévoit-on un jumelage entre Bonneval sur Arc et Asagi Aydere Köyü ??<br /> <br /> <br /> <br />
N
"Le bonheur est dans le pré "
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N
<br /> I'm singing in the rain !<br /> <br /> <br />
C
Magnifique de simplicité cette vieille dame türkmen.
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N
<br /> J'adore ses rides....<br /> <br /> <br />
L
Jolis moments partagés ... Les faucheurs me rappellent mon grand-père, j'aimais le noble geste du faucheur - de belles petites bouilles, j'ai un faible pour la petite grand-mère trés coquette avec son pendentif, ses foulards et sa canne - merci - bisous
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N
<br /> Moi aussi, j'ai craqué pour cette mamie.<br /> <br /> <br />
C
merveilleux reportage!! Trés émouvant.merci<br /> cécile
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N
<br /> Reportage pluvieux mais reportage heureux !<br /> <br /> <br />
L
Merci Nathalie, pour ce bel instant de vie... C'est souvent ceux qui possèdent le moins de richesses qui sont les plus généreux !<br /> Bonne continuation !
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N
<br /> Tout à fait d'accord ! Merci Libanat.<br /> <br /> <br />